À Rennes, la conférence « Digital Tech » vante l’innovation vertueuse

Coorganisée par le Poool, antenne de la French Tech en Ille-et-Vilaine, la « Digital Tech Conference » s’est tenue mardi 6 décembre dans la capitale bretonne sur le thème de l’innovation responsable et durable. Réduction des coûts, préservation des ressources, alternatives écologiques, inclusion sociale ont animé les débats.
L'édition 2022 de la Digital Tech Conference a mis l'accent sur les solutions vertueuses : low-tech, économie circulaire, protection des ressources (eau et énergie), numérique inclusif.
L'édition 2022 de la Digital Tech Conference a mis l'accent sur les solutions vertueuses : low-tech, économie circulaire, protection des ressources (eau et énergie), numérique inclusif. (Crédits : Reuters)

« Nous soutenons le développement d'une innovation responsable qui questionne en permanence son impact écologique et humain ». C'est sur la signature, par l'ensemble des partenaires, d'un Manifeste pour une innovation vertueuse, que s'est conclue mardi soir la septième édition de la « Digital Tech Conference ». Coorganisée au Couvent des Jacobins à Rennes par le Poool, émanation de la French Tech à Rennes et Saint-Malo, l'institut de recherche Inria et la SPL Destination Rennes, cette journée a rassemblé des profils issus du monde de la recherche, des entreprises et des startups.

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L'édition 2022 a mis l'accent sur les solutions vertueuses : « low tech », économie circulaire, protection des ressources (eau et énergie), numérique inclusif. Autant de sujets censés ouvrir un nouveau chemin à la tech, donner du sens aux métiers qui se créent, faciliter les recrutements voire l'embauche de personnes handicapées physiques ou neuro-atypiques.

Le biomimétisme pour contourner les limites de la planète

Les débats ont beaucoup porté sur les différentes sources d'innovation. Dans une intervention sur le sujet du biomimétisme, Kalina Raskin, directrice générale du Ceebios, structure coopérative dédiée au développement d'innovations inspirées du vivant, a exploré l'ambition de s'inspirer de la nature pour « fertiliser l'innovation ». Désignée « femme d'influence économique 2022 » par le Cercle des femmes d'influence, elle prône le biomimétisme comme un outil de la transition écologique, réconciliant biodiversité, innovation et économie.

« Qu'il s'agisse de produire de l'énergie ou d'imaginer de nouveaux matériaux, le vivant est capable de produire tout ce qu'on cherche à faire aujourd'hui pour répondre aux contraintes des limites planétaires » avance l'ingénieure physico-chimiste. « La coquille d'ormeaux fabrique une céramique ultra-résistante, le bambou est connu pour sa résistance mécanique, sa légèreté et ses propriétés déperlantes, la toile d'araignée pour sa soie plus résistante que le kevlar. Faire du biomimétisme c'est comprendre comment fonctionne le vivant et le modéliser. »

Dans ce domaine, l'écosystème français est même très dynamique selon la dirigeante du Ceebios. Elle a ainsi mis en avant les robots pour eaux turbides et confinées d'Elwave à Nantes, qui s'inspirent du sens électrique des poissons. Parmi les entreprises de pointe citées figurent aussi la société bretonne Hemarina, dont le substitut sanguin est issu du ver marin. Ou encore Tissium qui a mis au point une colle inspirée de la salive de l'escargot, de la bernacle et de l'arénicole.

« Les politiques publiques (CNRS, France 2030) prennent aujourd'hui le biomimétisme comme une voie d'avenir, c'est encourageant » a estimé Kalina Raskin, ajoutant que l'enjeu de la filière portait sur l'acquisition de nouvelles données.

La Bretagne se voit en territoire pilote des low-tech

Une meilleure gestion des ressources naturelles passe aussi par les « low tech » ou « innovation frugale » face à la surconsommation. « Les hautes technologies nous dépossèdent des objets qui nous entourent. La "high tech" génère même beaucoup d'exclusion. Il y a dans la "low tech" une dimension sociale importante » assure Alan Fustec, président du démonstrateur et centre de formation Kerlotec, installé à Brédily en Côtes d'Armor.

Également fondateur du cabinet de conseil en performance économique Goodwill Management, le dirigeant définit les « low tech » comme « une démarche inventive de conception et d'évolution de produits, de services, de procédés ou de systèmes pour maximiser leur utilité sociale, et dont l'impact environnemental n'excède pas les limites locales et planétaires ». « Pour s'offrir les "high tech" indispensables, mais éviter le gaspillage, de métaux par exemple, on doit aussi déployer les "low tech" », pour compenser les effets négatifs de la « high tech », ajoute-t-il.

Corécol : 500 entreprises engagées sous cinq ans

A l'heure où les entreprises s'inquiètent du coût de l'énergie ou sont confrontées à une problématique de maintenance des pièces, une trentaine d'entreprises bretonnes a donc commencé à expérimenter des solutions « low tech ».

Pour irriguer l'ensemble du tissu économique local, Kerlotec pilote le projet Corécol qui permettra pendant trois ans d'élaborer le contenu des formations aux « low techs » qui vont se déployer en Bretagne, à destination des demandeurs d'emploi, des étudiants, salariés et entrepreneurs.

Projet lauréat de France 2030, Corécol est développé par un consortium soutenu par la Région Bretagne, et réunissant le Low tech Lab, le CFPPA de Kernilien, le collège des organisations pour la résilience économique (CORE), l'université UCO et Goodwill Management. Son objectif est de former 500 personnes en trois ans, mettre en œuvre des « low tech » dans plus de 200 entreprises et doubler ces chiffres sous cinq ans.

Bilan carbone de la moule négatif

La « Digital Tech » a aussi offert un tremplin aux PME et startups pour mettre en avant leurs projets et leurs promesses autour de la transition énergétique et environnementale (TEE). Dans le domaine de la gestion des ressources, la société rennaise Energiency a souligné que ses solutions, déjà adoptées en France et à l'étranger par des groupes comme l'Oréal ou Arcelor-Mittal, permettaient de réduire de 15% sa facture énergétique.

Spécialiste des solutions de production photovoltaïque et de consommation d'énergie verte en circuit court, Okwind estime que les sites équipés de ses systèmes solaires intelligents atteignent une autoconsommation de 50 à 60%. Tandis que les solutions d'analyse et de pilotage intelligent du rennais Pure Control aident les acteurs de l'eau, industriels et producteurs d'énergie renouvelable à optimiser leurs coûts.

« La transition énergétique ne peut pas venir par décret, elle doit être prise en main par les citoyens, qu'ils soient particuliers, agriculteurs, industriels » estime Louis Maurice, le patron d'Okwind. En pleine croissance, l'entreprise affichera en 2022 un chiffre d'affaires de 35 millions d'euros mais vise les 175 millions d'euros en 2026.

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Lors d'un débat consacré aux technologies vertes, plusieurs entreprises en quête de solutions innovantes ont mis l'accent sur leurs problématiques de réduction des coûts de l'énergie et de leur empreinte carbone. C'est le cas de l'entreprise de conchyliculture Mytilimer à Cancale qui doit décarboner 100% de ses activités, car « le bilan de la moule est négatif ». Quant au transporteur Lahaye Logistic (1.700 personnes, 900 chauffeurs, 600 camions, 211 millions de chiffre d'affaires), il cherche des alternatives au gasoil et se tourne de plus en plus vers le ferroutage.

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