Conquête de la Lune : les États-Unis repoussent l'envoi d'astronautes à 2026

La Nasa a annoncé le report de près d'un an de ses missions Artémis 2, lors de laquelle un équipage doit faire le tour de la Lune sans y atterrir, et Artémis 3, qui doit y renvoyer des astronautes pour la première fois depuis 1972. Par mesures de sécurité pour la première et en raison de retard de développement pour la deuxième. Une nouvelle douche froide pour les ambitions américaines, alors qu’une mission robotique vient d’échouer.
À ce jour, seules quatre nations - les États-Unis, l'Union soviétique, la Chine et l'Inde - ont réussi à faire atterrir un appareil sur la Lune. Et parmi elles, seuls les États-Unis y ont déjà envoyé des humains.
À ce jour, seules quatre nations - les États-Unis, l'Union soviétique, la Chine et l'Inde - ont réussi à faire atterrir un appareil sur la Lune. Et parmi elles, seuls les États-Unis y ont déjà envoyé des humains. (Crédits : ESA)

L'objectif Lune de la Nasa est repoussé de quelques mois. En effet, alors que le programme Artémis a pour but d'y établir une présence durable, afin de préparer le voyage d'un premier équipage vers Mars, le patron de l'agence spatiale américaine, Bill Nelson, a indiqué avoir ajusté « notre calendrier, pour viser Artémis 2 en septembre 2025, et septembre 2026 pour Artémis 3 », lors d'une conférence de presse mardi.

Le programme Artémis a été inauguré en 2022 avec la mission Artémis 1, qui a fait voler avec succès le vaisseau Orion autour de la Lune, afin de le tester sans équipage. Artémis 2 était jusqu'alors prévue fin 2024, et Artémis 3 fin 2025.

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 Mais « la sécurité est notre première priorité », a justifié Bill Nelson, indiquant que l'agence spatiale et les entreprises privées partenaires avaient besoin de davantage de temps.

Problème de sécurité pour Artémis 2

La mission Artémis 2 doit durer environ 10 jours et envoyer quatre astronautes pour un voyage autour de la Lune, sans y atterrir. Il s'agit de trois Américains - Reid Wiseman, Victor Glover et Christina Koch - et d'un Canadien, Jeremy Hansen, tous déjà en plein entraînement.

Elle est repoussée pour des raisons de sécurité, car plusieurs problèmes doivent être résolus avant le décollage, a expliqué Amit Kshatriya, haut responsable à la Nasa. Le premier concerne le bouclier thermique protégeant la capsule Orion lors de son retour dans l'atmosphère terrestre. Durant Artémis 1, de la matière calcinée s'en est libérée, ce qui n'était pas prévu. Une enquête sur ce sujet doit se conclure au printemps. La Nasa souhaite également plus de temps pour se pencher sur les batteries du système d'éjection de la capsule Orion, qui doit fonctionner en cas de souci au décollage.

Tout n'est pas prêt pour Artémis 3

Artémis 3 sera ensuite la première mission à déposer des astronautes sur la surface lunaire depuis plus de 50 ans et la fin d'Apollo. Mais deux éléments essentiels ne sont pas encore prêts : d'abord un alunisseur, commandé à la compagnie spatiale SpaceX, et des combinaisons spatiales adaptées à l'environnement lunaire, dont le développement a été confié à Axiom Space. La nouvelle date de 2026 permet de prendre en compte « les défis de développement rencontrés par nos partenaires industriels », a déclaré Amit Kshatriya.

L'alunisseur sera une version modifiée du vaisseau Starship, actuellement en cours de développement par l'entreprise du milliardaire Elon Musk. Or les deux premiers vols de Starship, monté sur son propulseur Super Heavy, se sont soldés en 2023 par des explosions. Un nouveau vol test devrait avoir lieu en février, a déclaré ce mardi Jessica Jensen, responsable chez SpaceX.

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Pour atteindre la Lune, Starship devra par ailleurs être ravitaillé en carburant en vol, une opération risquée et pas encore testée. Environ « une dizaine » de Starship remplis de carburants devront décoller pour alimenter l'exemplaire du vaisseau devant faire le voyage jusqu'à la Lune, a précisé Jessica Jensen. Un alunissage de Starship sans équipage devra également être réalisé avant Artémis 3.

Artémis 4 est, elle, toujours prévue en septembre 2028. Il s'agira de la première mission vers la nouvelle station spatiale Gateaway. Le lancement des deux premiers éléments de cette station en orbite autour de la Lune devait avoir lieu en 2025 mais ce calendrier va également être revu, a fait savoir la Nasa.

Les ambitions américaines douchées en 48h

Ces annonces ne sont vraisemblablement pas liées aux déboires rencontrés par la mission robotique lancée lundi par la start-up américaine Astrobotic. Son alunisseur, nommé Peregrine et développé avec le soutien de la Nasa, a expérimenté de graves problèmes en vol depuis son décollage. Il devait initialement atterrir sur la Lune, ce qui aurait été une première pour un appareil américain depuis plus de 50 ans. Mais suite à une « anomalie » lui faisant perdre une grande quantité de carburant, l'entreprise a indiqué qu'il n'y a désormais « aucune chance » qu'il se pose en douceur comme prévu sur l'astre. La compagnie a toutefois dit vouloir continuer à opérer le véhicule dans l'espace le plus longtemps possible, afin de continuer à récolter des « données précieuses » pour sa prochaine tentative d'alunissage.

Ces mauvaises nouvelles ne manquent pas de questionner la nouvelle stratégie de la Nasa. Via notamment son programme baptisé CLPS, l'agence spatiale américaine a passé des contrats avec plusieurs entreprises, dont Astrobotic, pour l'envoi d'expériences et de technologies sur la Lune. Le but est d'étudier l'environnement lunaire en vue du retour d'humains sur la surface. En encourageant le développement d'une économie lunaire, elle souhaite pouvoir se reposer sur le secteur privé, et ainsi bénéficier de services pour moins cher qu'en se chargeant elle-même du développement. Mais cette tactique augmente aussi sa dépendance vis-à-vis de partenaires extérieurs.

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La Lune attire toutes les convoitises

Reste que les États-Unis ne sont pas les seuls à viser le satellite naturel de la Terre. À ce jour, seules quatre nations - les États-Unis, l'Union soviétique, la Chine et l'Inde - ont réussi à faire atterrir un appareil sur la Lune. Et parmi elles, seuls les États-Unis y ont déjà envoyé des humains.

Mais les ambitions sont grandes. La Chine travaille pour y envoyer des humains d'ici 2030, et y construire une base. « Je ne crois vraiment pas que la Chine atterrira (sur la Lune) avant nous », a néanmoins estimé ce mardi Bill Nelson, malgré le report d'Artémis 3 à 2026. Une mission de l'agence spatiale japonaise (Jaxa) doit par ailleurs tenter d'alunir dans environ deux semaines.

Les échecs se sont en parallèle multipliés ces dernières années. Des compagnies privées israélienne et japonaise ont aussi tenté d'alunir, mais ces missions se sont soldées par des crashs. En août, c'est la Russie qui a raté le coche : la sonde russe Luna-25 s'était écrasée à la suite d'un incident survenu lors d'une manœuvre préalable à son alunissage. Moscou avait alors promis de ne pas abandonner. « Nous savons qu'il faut emprunter des sentiers ardus pour arriver jusqu'aux étoiles », avait déclaré à la presse son porte-parole Dmitri Peskov.

De son côté, l'Agence spatiale européenne reste concentrée sur les lanceurs et l'exploration scientifique vers des destinations plus lointaines, comme l'avait rappelé fin août le commissaire européen Thierry Breton.

(Avec AFP)

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Commentaire 1
à écrit le 10/01/2024 à 8:51
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Bref grâce à l'argent public on va sur Mars et on y fait même voler un hélicoptère, mais l'activité privée, elle aussi ne se reposant que sur l'argent public mais il ne faut pas le dire car très mal employé dans les paradis fiscaux ne servant même à ...

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