Étape majeure pour Vinci pour sortir de sa dépendance aux autoroutes françaises

Alors que la fin du pactole des autoroutes françaises s'approche inexorablement, Vinci poursuit son chemin vers le rééquilibrage de ses activités. Engagée sur le long terme, cette stratégie vient de passer une étape significative, bien aidée par l'intégration de Cobra, complément indispensable à ce qui était déjà fait avec les aéroports et les autoroutes étrangères.
Léo Barnier
Vinci fait tout pour réduire sa dépendance aux autoroutes françaises, mais garde l'espoir de conserver sa machine à cash.
Vinci fait tout pour réduire sa dépendance aux autoroutes françaises, mais garde l'espoir de conserver sa machine à cash. (Crédits : CHARLES PLATIAU)

La stratégie n'est pas nouvelle, mais elle vient de franchir un nouveau palier. Lors des résultats de Vinci, son PDG Xavier Huillard a pu annoncer fièrement que la contribution cumulée des branches Vinci Concessions, Vinci Energies et Cobra IS à la performance opérationnelle avait dépassé pour la première fois celle de Vinci Autoroutes. De quoi se montrer confiant, selon lui, dans la capacité du groupe à se passer des concessions autoroutières françaises qui prendront fin entre 2032 et 2036. Pour autant, Vinci aura bien besoin de performer sur plusieurs tableaux pour compenser le manque à gagner.

Xavier Huillard n'a pas hésité à parler de résultats records pour l'année 2023, avec des indicateurs financiers en hausse significative par rapport à l'année précédente, qu'il s'agisse du chiffre d'affaires (+12 % à 69 milliards d'euros), du flux de trésorerie libre (+22 % à 6,6 milliards d'euros) ou d'Ebitda (bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement, +17 % à 12 milliards d'euros).

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Mais au-delà de ces chiffres, le dirigeant a également insisté sur la structure de ces résultats : « En 2006, nous avions un Ebitda qui était composé à quasiment 60 % des autoroutes. Le reste étant les activités dites de travaux. Si nous faisons le même calcul en 2023, nous nous apercevons que les autoroutes ne représentent plus que 39% de l'Ebitda. En regardant les autres branches, vous arrivez à la conclusion que les développements très volontaristes que nous avons fait d'une part Vinci Airports et d'autre part dans le monde de l'énergie permettent à ces deux activités de générer un total d'Ebitda qui dépasse pour la première fois celui en provenance des autoroutes. »

Le PDG du groupe Vinci estime que son groupe vient ainsi de passer une étape significative dans sa stratégie de diversification pour faire face à une perte éventuelle de ses concessions autoroutières françaises dans la prochaine décennie, en particulier les Autoroutes du Sud de la France (ASF) en 2036.

« Nous savons bien que les concessions autoroutières françaises vont finir par s'arrêter. C'est écrit dans les contrats », admet sans difficulté Xavier Huillard.

Si rien ne garantit que Vinci va perdre sa poule aux œufs d'or, le groupe s'y prépare depuis longtemps et s'évertue donc à développer d'autres débouchés.

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Cobra, pendant indispensable aux concessions

C'est cette stratégie qui a présidé au développement du groupe depuis une dizaine d'années dans le domaine aéroportuaire, avec encore récemment l'acquisition de 30 % du groupe mexicain OMA, ainsi que sur les autoroutes étrangères. Cette dernière s'est principalement exprimée en Amérique latine, en Grèce et en Allemagne, mais Xavier Huillard ne renonce pas à se développer aux Etats-Unis même si « ce n'est pas très facile ».

En plus de ces deux activités, regroupées au sein de Vinci Concessions, une dernière pierre à l'édifice a été ajoutée en 2021 avec l'acquisition de Cobra IS dans le domaine de l'énergie.

« C'est la raison pour laquelle nous avons demandé à Cobra de continuer à développer des actifs d'énergies renouvelables, qui sont une forme de concession. Et non plus avec l'intention de les vendre à l'extérieur comme c'était précédemment le cas du temps de son précédent actionnaire, mais de les garder », détaille le PDG de Vinci.

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Ce troisième pilier apparaît aujourd'hui comme nécessaire pour la réussite de cette stratégie. « Jusqu'à il y a quatre ans cinq ans, nous pensions que le marché accessible en matière d'aéroports et d'autoroute en concession en dehors de France était suffisamment profond pour nous permettre de faire cette compensation », concède le PDG de Vinci.

Si la contribution à l'Ebitda des branches Energies et Cobra d'un côté et Concessions de l'autre sont assez proches, elles ont l'avantage d'être sur des modèles assez différents. La première emploie peu de capitaux (8 % du total, auxquels s'ajoutent les 9 % de Cobra IS), mais offre un apport conséquent en chiffre d'affaires (28 % + 9 % pour Cobra IS) avec une marge opérationnelle de l'ordre de 7 %.

A l'inverse, Vinci Concessions mobilise 43 % des capitaux employés et contribue modérément au chiffre d'affaires, à hauteur de 7 %, mais génère une marge opérationnelle qui tend vers les 50 %, voire plus de 60 % pour les aéroports. Des chiffres qui s'approchent de ce qui se fait sur les autoroutes françaises.

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Encore du chemin à parcourir

Cette stratégie commence donc à porter ses fruits de façon significative, mais il va falloir faire encore un important bond en avant pour arriver à se passer de 39 % de ses bénéfices opérationnels, et même 43 % de ses bénéfices nets. Bien qu'il n'ait pas renoncé à proroger sa concession chez ASF, Xavier Huillard prévient : « Nous ne sommes pas au bout de l'histoire. Nous ne sommes pas tout à fait au milieu du chemin entre 2006 et la fin des concessions autoroutières, mais nous ne sommes bien avancés de façon à, en quelque sorte, pouvoir compenser le jour venu la perte d'Ebitda induite par le fait que les concessions autoroutières progressivement ne seront plus dans notre portefeuille. »

Le PDG de Vinci est néanmoins convaincu de la capacité de son groupe a relevé ce défi, tablant sur le fait que « ce mouvement va continuer sur fond des puissantes mégatendances environnementales, énergétiques et digitales ». Il voit ainsi un important potentiel de croissance dans les concessions comme dans l'énergie. Sans donner de chiffre, il estime avec ces trois axes avoir largement la profondeur de marché nécessaire pour compenser les autoroutes françaises, voire beaucoup plus.

Léo Barnier

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Commentaires 7
à écrit le 09/02/2024 à 12:36
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Ce qui montre donc bien a l'époque , que le fait que lemaire, macron, borne soient derrière l'octroi d'une délégation de service public qui en fait construit des fortunes aux actionnaires de vinci est un choix! le titre dit plus presque que les acte...

le 10/02/2024 à 12:38
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@gonzague. En intronisant un banquier au pouvoir du royaume, la France ne pouvait pas espérer un abbé Pierre comme président de la République.

à écrit le 09/02/2024 à 7:40
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Bah ça va ils ont déjà la moitié des parkings français, tranquille hein...

à écrit le 09/02/2024 à 6:37
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La fin des concessions signifie le retour à la gestion des autoroutes par l'État et sa légendaire incompétence en ce domaine, très rapidement le réseau autoroutier va devenir une réplique sur route de la SNCF, l'infrastructure va se dégrader faute d'...

à écrit le 09/02/2024 à 5:04
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Privatiser les actifs communautaires, vieille combine qui ne dure qu'un temps. Les actionnaires salivent encore un peu, les vaches grasses resteront a l'etable, avec ce qui se prepare a l'Est, ca risque de coincer serieusement a l'Ouest. Il reste q...

à écrit le 08/02/2024 à 21:11
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"les concessions autoroutières françaises vont finir par s'arrêter" mais ensuite il faudra de nouveaux concessionnaires, l'Etat ne sait pas et ne peut pas gérer les péages (qui perdureront, dixit un ministre, hors de question de les baisser, y a (tou...

le 09/02/2024 à 10:55
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