Rénovation de la gare du Nord : Auchan perd son procès contre la SNCF

Le tribunal de commerce de Paris a condamné vendredi Ceetrus, la foncière d'Auchan, à verser plus de 47 millions d'euros à la SNCF dans le cadre de l'un des litiges qui opposent les deux entreprises depuis que la SNCF a rompu il y a deux ans le contrat de modernisation de la gare du Nord qu'elle avait conclu avec Ceetrus.
(Crédits : Valode & Pistre)

Le tribunal de commerce de Paris a tranché et a condamné Ceetrus, (ex-Immochan), filiale immobilière du groupe Auchan à verser plus de 47 millions d'euros à la SNCF dans le cadre de l'un des litiges qui opposent les deux entreprises depuis que la société ferroviaire a rompu il y a deux ans le contrat de modernisation de la gare du Nord qu'elle avait conclu avec Ceetrus.

Le tribunal s'est prononcé sur la garantie à première demande fournie par Ceetrus, concessionnaire déchu du projet de rénovation et appelée par Gares & Connexions à hauteur de 47 millions d'euros pour financer les travaux du programme de rénovation « Horizon 2024 ». La filiale du groupe Auchan était assignée par la filiale de la SNCF sur la bonne fin des travaux. Tout avait pourtant bien commencé en février 2019. A l'époque, la filiale de la SNCF et la filiale d'Auchan créent une coentreprise sous forme de société d'économie mixte à opération unique (Semop) baptisée StatioNord. Cette dernière se voit alors attribuer un contrat de financement, de conception, de réalisation et d'exploitation des commerces de la première gare d'Europe - 750.000 usagers quotidiens - pour une durée de 46 ans.

Quatre ans de bras de fer

Mobilisant 100% de fonds privés de Ceetrus, cette dernière devait créer une dizaine de milliers de mètres carrés d'espaces de loisirs, culturels et sportifs et agrandir les espaces commerciaux, bureaux et voyageurs en vue de la Coupe du monde de rugby de l'automne 2023 et des Jeux olympiques et paralympiques de l'été 2024.

Sauf qu'après avoir donné son feu vert au Conseil de Paris, la Ville fait volte-face fin 2019. Tant est si bien qu'à l'été 2020, les travaux n'ont toujours pas commencé et StatioNord, coentreprise des deux filiales, fait savoir qu'elle ne souhaite plus travailler avec Vinci. Et d'annoncer aux équipes de Gares & Connexions qu'elle fera désormais appel à Bouygues.

« Le budget s'envole alors, passant de 389 millions d'euros puis à 500 et enfin à 700 millions d'euros. Le planning est décalé de deux ans et il devient impossible de terminer pour les Jeux olympiques et paralympiques », se souvient une source proche du dossier.

En novembre 2020, un accord à l'amiable est finalement trouvé entre les élus locaux et Gares & Connexions, poussant la filiale de la SNCF à revenir à la charge à l'été 2021. Elle intime alors à son concessionnaire de respecter le budget et le calendrier. En réponse, StatioNord indique que le planning pourrait être optimisé en fermant quatre voies...

Une déchéance pour faute

C'en est trop pour Gares & Connexions qui, le 21 septembre 2021, met fin à l'opération en résiliant la concession, évoquant « une déchéance pour faute » et « un vrai dysfonctionnement de la maîtrise d'ouvrage ». Actionnaire majoritaire (66%) de la coentreprise, Ceetrus réagit alors en déclarant « regrette[r] le manquement manifeste de son partenaire à ses responsabilités de co-actionnaire et à la loyauté requise entre les partenaires d'une entreprise commune puisqu'il est pleinement partie-prenante à la réalisation du projet et à toutes les décisions afférentes dès son origine ».

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A l'approche du jugement, une source proche du dossier s'étonnait encore que la filiale de la SNCF, co-actionnaire à 34% de la Semop, reproche à la filiale d'Auchan la non-transmission de documentations, sachant que l'opérateur siégeait au directoire, de par sa qualité justement d'actionnaire. Un autre raconte que Gares & Connexions a demandé à trente-cinq reprises le calendrier des opérations et que le rôle des personnalités détachées chez StatioNord était d'assurer du contrôle technique avant de jouer à l'œil de Moscou.

Toujours est-il que l'entité de la compagnie ferroviaire se concentre sur des travaux plus légers, qu'elle a présentés en réunion publique le 17 octobre 2022 à la mairie du Xe arrondissement. En présence d'Alexandra Cordebard (la maire socialiste d'arrondissement), de David Belliard (l'adjoint EELV d'Anne Hidalgo chargé de la transformation de l'espace public), deux cadres de la filiale de la compagnie ferroviaire ont présenté les travaux à venir d'ici à mai 2024, peu avant les Jeux olympiques et paralympiques.

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Car après le tribunal de commerce, la saga judiciaire ne sera pas pour autant terminée. Depuis juin 2022, les filiales d'Auchan et de la SNCF réclament, chacune, à l'autre près de 300 millions d'euros au titre des dépenses engagées et des préjudices. Selon nos informations, l'instruction du Tribunal administratif de Paris se clôturera le 31 octobre prochain. Rendez-vous donc au deuxième semestre 2024 pour une nouvelle audience...

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Commentaires 4
à écrit le 24/09/2023 à 11:07
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Pas de pot! Pour une fois que quelqu'un voulait "prendre" le train...

à écrit le 23/09/2023 à 12:09
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Ce groupe privé a cru à la bonne affaire sur le dos de l opérateur publique .. or celui s est rebiffé.. la sncf est elle en train de changer et de ne plus «  se laisser faire » peut être !….

à écrit le 23/09/2023 à 12:09
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Ce groupe privé a cru à la bonne affaire sur le dos de l opérateur publique .. or celui s est rebiffé.. la sncf est elle en train de changer et de ne plus «  se laisser faire » peut être !….

à écrit le 22/09/2023 à 23:31
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Certaines boites du privé prennent le secteur public pour une vache à lait .. donc rien de nouveau …

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